dimanche 31 juillet 2016

Un réveil à Barcares

Ce n'est, finalement, qu'après ton départ le soir, que j'ai réussi à m'alléger du fardeau de sommeil manquant que je trainais depuis le matin tôt, depuis le moment où, te laissant endormi, j'étais descendue m'allonger dans la mer comme dans notre lit, les vagues molles en guise de drap, avec l'impression de faire chambre à part. 

samedi 30 juillet 2016

Vie et mort des insectes

D'avoir voulu passer la nuit dans mon cou, elles l'avaient payé de leur vie et, au matin, je trouvai leurs minuscules cadavres dans mon lit. 
L'après-midi, mes mains sous ma tête trop longtemps, engourdies, j'avais été tirée de ma sieste par une autre sorte de fourmis. 

vendredi 29 juillet 2016

Le cabinet des rêves 290


M. a acheté une pizza pour qu'on la mange avec T. et V.
Elle est assez grande pour quatre mais il s'agit juste d'un fond de pâte à pain sans sauce tomate, sans fromage et dont l'unique garniture -des poivrons rouges crus- n'est pas également répartie. 
Je me dis qu'il va absolument falloir y ajouter des ingrédients. 
Quand M. me dit qu'il l'a payée plus de cinquante euros, j'en suis catastrophée. 

Rêve du 9 juillet 2016

jeudi 28 juillet 2016

CHOSE  VUE

L'activité des deux cochons m'a fait détourner la tête avec autant de pudeur que si, à la place d'être en train de voyager, j'avais ouvert par erreur la porte de leur chambre à coucher. 

mercredi 27 juillet 2016

CHOSE  VUE

La scène se répète invariablement, je peux en attester, chaque mardi aux alentours de 14h07 rue Blanquerna. 
Des deux qui la rejoignent, qu'elle attend sur le banc le plus proche de la terrasse du glacier, c'est toujours le chien qu'elle embrasse le premier. 

mardi 26 juillet 2016

Tuesday self portrait

Il exagère, sans doute. Personne ne peut vivre sans exagérer un peu. S'il y a des périodes dans la vie de Julián, il faudrait les exprimer conformément à un indice d'exagération. Jusqu'à dix ans, il a exagéré très peu, presque pas. Mais à partir de dix et jusqu'à dix-sept ans, il s'est livré à l'imposture. Et depuis ses dix-huit ans, il s'est converti en expert des formes les plus diverses d'exagération. Depuis qu'il est avec Verónica, son exagération a diminué considérablement, malgré quelques rechutes. 
Il est professeur de littérature dans quatre universités de Santiago. Il aurait aimé s'en tenir à une spécialité mais la loi de l'offre et de la demande l'a obligé à être versatile : il donne des cours de littérature hispano-américaine mais aussi de poésie italienne, même s'il ne parle pas italien. Il a lu, avec attention, Ungaretti, Montale, Pavese, Pasolini et des poètes plus récents comme Patricia Cavalli et Valerio Magrelli, mais en aucun cas il n'est spécialiste en poésie italienne. Pour le reste, au Chili, ce n'est pas si grave de donner des cours de poésie italienne sans connaître l'italien parce que Santiago est plein de professeurs d'anglais qui ne savent pas l'anglais et de dentistes qui savent à peine extraire une dent -et de coachs personnels en surpoids et de professeurs de yoga qui ne réussiraient pas à faire cours sans une généreuse dose préalable d'anxiolytiques.  
Traduction libre d'un extrait* de La vida privada de los árboles (La vie privée des arbres) de Alejandro Zambra. 
*
Exagera, sin duda. Nadie puede vivir sin exagerar un poco. Si es que hay periodos en la vida de Julián, habría que expresarlos de acuerdo con un índice de exageración. Hasta las diez años exageró muy poco, casi nada. Pero desde los diez hasta los diecisiete años se entregó a la impostura. Y desde los dieciocho en adelante se convirtió en un experto en las más diversas formas de exageración. Desde que está con Verónica la exageración ha venido disminuyendo considerablemente, a pesar de algunas recaídas. 
Es profesor de literatura en cuatro universidades de Santiago. Hubiera querido ceñirse a una especialidad, pero la ley de la oferta y la demanda lo ha obligado a ser versátil : hace clases de literatura hispanoamericana y hasta de poesía italiana, a pesar de que no habla italiano. Ha leído, con atención, a Ungaretti, a Montale, a Pavese, a Pasolini, y a poetas más recientes, como Patricia Cavalli y Valerio Magrelli, pero en ningún caso es un especialista en poesía italiana. Por lo demás, en Chili no est tan grave dar clases de poesía italiana si saber italiano, porque Santiago está lleno de profesores de inglés que no saben inglés, y de dentistas que apenas saben extraer una muela -y de personal trainers con sobrepeso, y de profesoras de yoga que no conseguirían hacer clases sin una generosa dosis previa de ansiolíticos. 

lundi 25 juillet 2016

L'enfance des bourreaux (fragments d'insularité)

Nul besoin de maîtriser leur langue pour comprendre le motif de la plainte énoncée entre deux hoquets par ces enfants, petits, couverts de larmes autant que de sable, qui désignent d'un doigt tremblant leurs tortionnaires à leurs parents, leur mère le plus souvent, qui les consolent négligemment, levant à peine les yeux de leur livre, de leur revue, de leur sommeil, de leur boisson, décidés qu'ils sont, eux, à ne pas se laisser distraire du paradis. 

dimanche 24 juillet 2016

Les rendez-vous du jeudi

Le nombre décroissant 
chaque jour 
sur ma carte d'abonnement 
chaque jour 
m'assure 
me rassure 
le temps passe. 

Mais
plus encore 
me met en joie 
chaque jour
où le nombre ne décroit
pas
car tu me rejoins
je te rejoins
car nous rentrons 
ensemble. 

samedi 23 juillet 2016

CHOSE  VUE


Quand le bus fut prêt à partir, une seule place resta vacante. Ils avaient été quelques uns, cependant, montés alors que les sièges étaient quasiment tous occupés, à avancer jusqu'à sa hauteur avant de rebrousser chemin et s'installer en amont, préférant à la sienne la proximité d'enfants bruyants et remuants.
Lui, pourtant, présentait la garantie d'un voisinage tranquille, sans bavardage intempestif au téléphone, sans coup de coude dans les côtes, sans bagarre d'accoudoir. 
Sans bras, il occupait nettement moins de place que le plus mince d'entre nous.

vendredi 22 juillet 2016

Le cabinet des rêves 289

C'est dans cette chambre bleue que je fis un rêve majeur. Il est toujours délicat de trancher de l'importance des rêves, sans doute faut-il s'en rapporter à celle qu'on leur donne, tout simplement. Mais là encore nous sommes vite leurrés, le rêve triche avec nous, se fait petit pour mieux cacher l'énormité de son contenu, se fait beau sans rien dire pour autant. Quand je dis "majeur", j'indique juste que ce rêve faisait partie des dix ou vingt qui ponctuent une vie et en condensent le sens au bout du compte. Je ne me souviens plus du décor exact, des éléments de la fiction qui lui donnait sa logique, mais je peux retrouver avec précision la fin du rêve, quand j'appris, par une intuition foudroyante, comment je serais amené à mourir pus tard, par quelle partie de mon corps, que je ne nommerai pas ici par superstition.
Michel Braudeau. La Non-Personne
Pour faire sortir le gros chien jaune, je l'accompagne dans la cour. 
Quand je ferme la porte, elle se ferme derrière moi et je suis enfermée dehors. 
La cour est pleine de boue et le gros jaune, en tombant dedans, devient une espèce de petit ratier tout trempé. 
Je me dis que je vais devoir essayer de réveiller M. en lançant des cailloux à la fenêtre. 
Je trouve des pierres par terre. 
Je commence à les lancer en espérant qu'elles feront assez de bruit sans, toutefois, briser la vitre.

Rêve du 6 juillet 2016

jeudi 21 juillet 2016

CHOSE  VUE

Un homme et une femme. 
L'homme debout, près du banc sur lequel la femme est assise. 
Ils mangent, tous les deux, un sandwich. Ils se dépêchent, tous les deux, de manger un sandwich. 
Bien que ce sandwich soit réalisé dans une baguette, ils le mordent avec aussi peu d'efforts que s'il s'agissait de pain de mie. 
La garniture, quelle que soit sa nature, ne nécessite pas davantage l'usage forcé des dents.
L'homme, la femme, chacun fait goûter son sandwich à l'autre. 
La femme élève le sien en tendant le bras vers l'homme qui abaisse un peu la tête pour en prélever une bouchée. 
L'homme place le sien perpendiculairement à lui, à la hauteur de son bas ventre. 
La femme s'incline vers lui en ouvrant la bouche. 

mercredi 20 juillet 2016

CHOSE souvent VUE


une paire de jambes 
rouge écrevisse, recto 
blanc aspirine, verso 

mardi 19 juillet 2016

Tuesday self portrait


A notre retour je restai trois jours à Lima à discuter avec mes amis, à fumer des cigarettes sur la falaise, à réfléchir au problème d'un jeune voisin, Amadeus, qui souffrait de schizophrénie. C'était très inhabituel pour moi. Je croyais qu'un schizophrène n'est pas conscient de son état, par définition, qu'il est trop atteint pour savoir de quoi il souffre, s'il souffre, s'il ne croit pas au contraire que tout le monde est fou sauf lui. L'idée d'une maladie de l'esprit en Europe a toujours ce caractère très fort d'aliénation absolue, qui nécessite l'isolement, l'internement, la privation des droits. Pas forcément au Pérou où chacun cultive un petit potager de folie pour son usage personnel. On demandait à Amadeus : qu'est-ce qui ne va pas ? Il disait : aujourd'hui je me sens un peu schizophrène. Et il prenait deux cachets d'un médicament qu'on lui prescrivait pour se soigner. On bavardait avec lui de sa maladie, paisiblement, d'où elle venait, comment elle se manifestait, de ses creux et de ses pics, de l'effet des médicaments. Les mêmes scènes observées en France nous auraient fait tous passer pour également perturbés, dialogues entendus à l'asile. Il faudrait expliquer le caractère de folie douce qui s'emparait naturellement de chacun dans ce contexte. Même le chat de la maison, Chichi, était névrosé. Il ne voulait pas pisser dans le jardin si le chien Castor s'y trouvait, et le matin, comme il était grand amateur d'olives noires et de fromage blanc, s'il nous arrivait de l'ignorer ou de tarder à lui en offrir, il simulait une crise cardiaque des plus théâtrales. Il y avait donc beaucoup de gentillesse dans les conversations, même quand l'état d'Amadeus s'aggravait et qu'il plongeait dans l'angoisse pure, là où nous ne pouvions le suivre. Quand il en sortait, les amis étaient là, l'épreuve était dédramatisée parce que les ponts n'avaient pas été coupés, et c'est peut-être grâce à ces moments où nous nous laissions flotter avec lui qu'il a pu guérir par la suite, se libérer des médicaments et du mot de schizophrénie.  
Michel Braudeau. La Non-Personne

lundi 18 juillet 2016

Trafic d'organes (fragments d'insularité)


Les embouteillages matinaux me donnent le temps
 de les toiser
 tous ces gens 
plus bas que moi. 
D'eux 
je vois un bras 
une main sur le volant
une cigarette au bout des doigts.
 Le tronc. 

dimanche 17 juillet 2016

Le jour où tu aurais dû mourir

n'aurait en rien mérité d'être le dernier.   

samedi 16 juillet 2016

En avoir ou pas

Lui a-t-on répété comme à moi "Tu verras, ce sera différent quand ce seront les tiens" avec l'implacable aplomb que porte en lui le futur comme si... alors que... alors que, justement, je n'aimais rien tant que pouvoir les rendre, rien tant que n'avoir à les garder sans avoir à les garder, lui a-t-on dit cela comme à moi, par convention ou bien conviction ou n'a-t-il pas fallu l'en convaincre car, au contraire de moi, il en voulait depuis toujours, l'homme à la caisse du supermarché, des enfants, l'homme dont les jumeaux hurlaient ensemble dans leur poussette tandis qu'il se hâtait de payer?

vendredi 15 juillet 2016

Le cabinet des rêves 288

Mon père est revenu
Il a commencé des travaux dans la salle de bains mais s'est interrompu avant d'avoir fini. 
Je voudrais prendre une douche mais je ne peux pas : de l'eau coule sans arrêt et inonde tout à côté de mon lit qui est au centre de la pièce. 
Comme je l'appelle et qu'il n'arrive pas, je remets mon pyjama, sors de la pièce et réitère mon appel vers le haut de la maison -je suis au sous-sol.
Il ne semble pas du tout enthousiaste à l'idée de devoir finir les travaux, en revanche, il me rappelle la proposition qu'il m'a déjà faite : me faire un tatouage, quel que soit celui que je désire. 
J'y réfléchis : quel dessin ? à quel endroit ?
Mais, décidément, je ne tiens pas du tout à porter un tatouage. 
Je monte pour le lui dire et le convaincre de descendre. 
Je le trouve couché, prêt pour la nuit, avec ma mère. 
Ils sont chacun à l'extrémité de leur côté du lit et se parlent en s'agaçant mais sur un mode humoristique, de plaisanterie. 

Sans transition mais nous sommes tous, soudain, tout habillés, j'ai invité mon père à goûter une salade que j'ai rapportée du Japon. 
Il s'exclame : Ah oui ! C'est un shiitake ! quand je lui parle du champignon qui aromatise tant la bouchée qu'il est en train de manger. 
Je suis en train de déballer tous les ingrédients de ma salade, un par un. 
Ils sont tous déshydratés, conditionnés sous vide, dans des emballages individuels. 
J'encourage mon père à faire la même chose pour la sienne sinon elle va rester fade mais non : il préfère la manger ainsi. 
Elle n'a pourtant aucun goût : elle date de quand je suis rentrée du Japon, il y a six ans. 
Il évoque Fukushima qui nous empêcherait de manger aussi simplement des aliments venus du Japon. 
Je lui fais remarquer que, bien avant la catastrophe, les Japonais n'avaient pas forcément la conscience de la salubrité de leurs aliments ou de leur goût. La preuve : les ingrédients de cette salade emballés dans autant de plastique. 
Ma mère assiste à tout mais ne mange pas de salade (elle n'a pas d'assiette) et n'intervient à aucun moment. Elle est une présence bienveillante mais que nous ne semblons pas remarquer. 

Rêve du 29 juin 2016 

jeudi 14 juillet 2016

L'anniversaire de l'écriture


Je n'allais pas bien
 pas tous les jours très bien
 il y a dix ans approximativement quand l'écriture est devenue
 quotidienne 
et 
colonne vertébrale.

Les jours où j'en doute
maintenant
 je me dis que tant que j'écris
au moins
je suis 
en vie.  

mercredi 13 juillet 2016

Ma vie sans la vie


car toutes les fois que j'explore les profondeurs de moi-même en quête de SENSations 
je n'y trouve 
p
l
u
s

r
i
e
n

mardi 12 juillet 2016

Tuesday self portrait

Souvent, quand elle était tout à fait épuisée, elle parlait toute seule en anglais : la grammaire simple et les sons mous paraissaient lui faire du bien, et elle était encore capable de s'endormir en plein dans cette langue étrangère. 
Sa manière aberrante de parler, qui évite strictement toute expression juste. Il faut connaître l'être tout entier pour comprendre ce qu'il veut dire dans chaque cas particulier. 
Ses facultés variables de compréhension. Tantôt elle paraissait intelligente, tantôt ignare. Selon la température ambiante, me disais-je souvent, selon les conditions météorologiques. Une intelligence météorologique. Il pouvait arriver qu'un soir elle parle intarissablement de la métempsychose : le lendemain, je me remettais à parler de la métempsychose, et elle, elle ne savait plus ce que c'était, la métempsychose. 
Botho Strauss. La dédicace.  

lundi 11 juillet 2016

Inculte (fragments d'insularité)


Il fait une chaleur d'enfer mais Gini refuse de quitter son cardigan, la pluie donne à Madrid, pour un instant, un air tropical. La mousson doit ressembler à cela, pense Gini qui, en réalité, a très peu voyagé. Presque tous les étés de sa vie, elle les a passés à Palma de Majorque, où elle sort à peine du club nautique. Et, oui, elle y a vu la famille royale des centaines de fois et, non, elle n'a pas grand-chose à en dire. Gini, la famille royale, la sienne ou celle de n'importe quel autre pays, elle s'en fiche. Elle ne comprend pas pourquoi les gens sont fascinés par les couples royaux ou les princesses et l'excitation et le trouble qui se produit chaque fois qu'ils visitent le club nautique ou font du shopping ou se promènent dans les rues de Palma. Ce n'est pas qu'elle les trouve antipathiques, les princes, les princesses ou tous leurs enfants, c'est qu'elle les trouve ennuyeux, trop grands et terriblement superflus.  
Ray Loriga. Traduction libre d'un extrait* de  Días aún más extraños. (Jours encore plus étranges)

Polis, ils n'avaient pas ostensiblement manifesté leur étonnement devant mon ignorance. Ce n'est pourtant que lorsqu'ils m'avaient précisé que le palais de l'Almudaina, qui figurait sur leur liste des attractions culturelles, était juste en face de la cathédrale, que j'avais compris qu'il s'agissait du palais royal, qui attire quelques centaines de milliers de visiteurs mais dans lequel je ne suis jamais entrée. 
Quand ils avaient parlé de Can Sales, en revanche, je savais très bien qu'ils parlaient de la bibliothèque. 


*Hace un calor del demonio pero Gini se niega a quitarse la rebeca, la lluvia le ha dado al centro de Madrid, por un instante, un aire tropical. Así deben de ser los monzones, piensa Gini, que en realidad ha viajado muy poco. Casi todos los veranos de su vida los ha pasado en Palma de Mallorca, donde apenas sale del club de mar. Y sí, ha visto a los reyes allí cientos de veces, y no, no tiene mucho que contar al respecto. A Gini, los reyes, los suyos, o los de cualquier otro país, le importan muy poco. No entiende por qué la gente se siente fascinada por los reyes, o las princesas, y acacha la excitación y el revuelo que se produce cada vez que visitan el club de mar, o salen de compras o pasean por las calles de Palma. No es que los reyes le caigan mal, ni los príncipes, ni las princesas, ni su legión de hijos, es que los encuentra aburridos, demasiado altos tremendamente innecesarios. 

dimanche 10 juillet 2016

Ma vie dans les plis

Au levant
 j'emporte un peu 
de notre lit sur ma peau 
tatouage éphémère
 il met 
à s'estomper le temps 
que tu mets 
à t'éveiller

samedi 9 juillet 2016

Troubles du sommeil

me réveillant au moment
des applaudissements
j'ai cru un moment
qu'il pleuvait

vendredi 8 juillet 2016

Le cabinet des rêves 287

Je reçois un message de C., amie Facebook : Maintenant que ça fait deux mois que tu tiens bon, tu peux savoir que je m'appelle Florence. 
Je m'étonne qu'elle ait chois un prénom-pseudonyme aussi éloigné du sien -et nettement moins joli. 
Je cherche à savoir ce qu'elle veut dire par "tenir bon" : avoir lu toutes ses publications ?
Elle a l'air reconnaissante de ma patience. 

Rêve du 26 juin 2016

jeudi 7 juillet 2016

Tentative de description 
d'une vie sous influence
(de la schizophrénie d'autrui)
6ème et dernier fragment


Alors tu te surprends à penser à l'avenir, tu te souviens qu'il est possible de penser à l'avenir, qu'il est normal de penser à l'avenir, qu'il est normal de ne pas connaître l'avenir mais normal aussi de ne pas en avoir peur, tu te souviens de l'adjectif normal, tu n'arrêtes pas de penser que ta vie va redevenir normale. 

mercredi 6 juillet 2016

Tentative de description 
d'une vie sous influence
(de la schizophrénie d'autrui)
5ème fragment


et puis
soudain
plus rien
aucun coup de téléphone 
à la porte personne


en la soignant
sans le savoir
les psychiatres
te soignent aussi

mardi 5 juillet 2016

Tuesday self portrait

Il pensait vraiment qu'elle ne pouvait pas ne pas s'ennuyer en vivant ainsi, qu'elle finirait par se lasser de sa vie et de lui-même. Plus bas, il se disait aussi que ces cent mille francs, ajoutés à son salaire à lui, permettraient à Lucile une vie beaucoup plus facile matériellement. Avec ce bel optimisme des hommes, il imaginait Lucile s'achetant gaiement deux petites robes par mois qui, évidemment, ne seraient pas signées d'un grand couturier, mais lui iraient parfaitement puisqu'elle était bien faite. Elle prendrait des taxis, elle verrait des gens, elle s'occuperait un peu de politique, du monde en général, des autres enfin. Sans doute, il regretterait de ne pas trouver en rentrant chez lui, comme un animal enfoui dans sa tanière, cette femme qui ne vivait que de lecture et d'amour mais il s'en sentirait vraiment rassuré. Car il y avait dans cette vie immobile, un absolu du présent, un dédain de l'avenir qui l'effrayait, le vexait même obscurément comme s'il n'eût été qu'un des éléments d'un décor, un décor de studio, qu'on brûlerait forcément, inexorablement au dernier tour de manivelle. 
"Je commencerais quand ?" dit Lucile. 
Elle souriait vraiment à présent. Après tout, elle pouvait bien essayer. Il lui était déjà arrivé de travailler dans son jeune temps. Elle s'ennuierait sans doute un peu mais elle le cacherait à Antoine. 
"Le 1er décembre. Dans cinq ou six jour. Tu es contente ?"
Elle lui jeta un coup d'oeil méfiant. Pouvait-il vraiment croire qu'elle était contente ? Elle avait déjà relevé des pointes de de sadisme chez lui. Mais il avait l'air innocent, convaincu. Elle hocha la tête gravement : 
"Je suis très contente. Tu avais raison, ça ne pouvait pas durer." 
Françoise Sagan. La chamade

lundi 4 juillet 2016

LE CLAN (fragments d'insularité)

Neuf coups n'ont pas encore résonné sur la place du village et mon caddie est déjà arrondi de toute une semaine de légumes, de fruits. 
Mises en plis fraîches, habits repassés, bijoux assortis... Quand je m'attable à la terrasse où les Majorquines sont déjà installées, je me félicite de ne jamais sortir sans rouge à lèvres. 

dimanche 3 juillet 2016

samedi 2 juillet 2016

Poema de mesa/Poème de table en version originale (sous-titrée*)

A fréquenter les cafés sans parler français, 
j'écris de la poésie minuscule en version originale.

Poema de mesa


Es una tarde en la cuidad, una tarde de verano verdadero. 
En la calle : el calor, inmóvil. 
En el bar : la frescura, ruidosa. 
Bocadillo, café americano, estoy esperando 
la hora de la cita en la peluquería. 
En la calle : músicos, turistas. 
En el bar : grupos de amigos. 
Charlando, gritando, riendo más que
en cualquier otro lugar en el mundo : 
¡vivo en España!
Estoy bebiendo un café muy fuerte, voy a hablar
español, todo el tiempo del corte. 
Cuando vives en un pais extranjero, si llevas el pelo corto, 
ir a la peluquería no es un descanso. 
Ya en Tokio, era un ejercicio lingüístico. 
Es casi la hora, me voy, preguntándome en qué
piensa Enrique cuando ve mi nombre
en su agenda, en qué piensa cuando es la hora
en la que llegue. 

*
C'est un soir en ville, un soir d'un véritable été. 
Dans la rue : la chaleur, immobile. 
Dans le bar : la fraîcheur, bruyante. 
Un sandwich, un café long, j'attends 
l'heure de mon rendez-vous chez le coiffeur. 
Dans la rue : des musiciens, des touristes. 
Dans le bar : des groupes d'amis. 
Qui discutent, qui crient, qui rient plus que
n'importe où ailleurs au monde : 
je vis en Espagne ! 
Je bois un café fort, je vais parler
espagnol, tout le temps de la coupe. 
Quand on vit dans un pays étranger quand on porte les cheveux courts, 
aller chez le coiffeur n'est pas de tout repos. 
Déjà à Tokyo, c'était un exercice linguistique. 
C'est presque l'heure, je m'en vais, en me demandant à quoi
pense Enrique quand il voit mon nom
sur son agenda, à quoi il pense quand c'est l'heure
que j'arrive.

vendredi 1 juillet 2016

Le cabinet des rêves 286

En m'éveillant, je vois ma paire de boucles d'oreilles par terre. 
Je m'aperçois que j'en ai perdu les attaches en dormant. 
Je m'aperçois aussi que les perles ne sont pas identiques alors que je les croyais assorties. 

Rêve du 21 juin 2016